Un candidat (indépendant) des « Cols Rouges », Claude Roy, qui se qualifie lui-même « d’excessivement de droite », a fait parler de lui en dénigrant carrément « l’immigration francophone, marocaine, algérienne, de la République dominicaine et d’Haïti ».
Je ne commenterai pas cette sortie, puisqu’elle parle tellement d’elle-même, mais j’aimerais quand même me pencher sur le mouvement des cols rouges. Depuis que j’en ai entendu parler, je n’ai jamais vraiment su ce que voulait dire l’expression « Col Rouge », mais c’est certain que je pense à « redneck », à tort ou à raison.
Au-delà de ça, en visitant leur site on constate qu’ils en beurrent épais avec le concept de la majorité silencieuse, ce qui est en soi un déficit au niveau de la crédibilité. Parce que la majorité silencieuse est une cruche vide, un concept abstrait malléable à souhait. C’est comme être devant les résultats d’un sondage sans répondants…
Mais ils sont quand même gentils, ils tentent d’expliquer qui ils sont en 12 points. Chaque point répond à la question : « Qu’est-ce qu’un Col Rouge? » J’aimerais ici les reprendre un à un et les commenter :
Quelqu’un qui se lève le matin, qui travaille fort ou qui a travaillé toute sa vie, et qui n’a pas le temps d’aller manifester…un mardi à 14 heures.
Comme premier point, c’est assez simpliste. Cela sous-entend que les travailleurs qui sont capables de prendre la décision de manifester (les travailleurs syndiqués peuvent voter une grève) et qui ont la possibilité de le faire (il y a des horaires de travail atypiques, entre autres) travaillent moins fort que les autres, qu’ils sont paresseux, etc. Cela sous-entend surtout que quelqu’un de bien considère que le droit de manifester n’est vraiment pas dans ses priorités. Mais j’aimerais leur rappeler qu’il y a eu une manifestation de 50 000 personnes (de droite) à Québec pour soutenir CHOI en 2004…
Quelqu’un qui se sent pris à la gorge par différents groupes de la société pour lesquels on doit constamment payer.
Je devrais être un col rouge, puisque je me sens un peu comme ça. Mais je crains que leurs « différents groupes de la société » ne soient pas les mêmes que moi… Les miens sont surtout proches des libéraux de Jean Charest. Les leurs sont les assistés sociaux, les artistes subventionnés, etc. À chacun ses priorités…
Quelqu’un qui se sert surtout d’une casserole pour préparer les repas après une journée de travail.
On croirait entendre Jean Charest et son obsession-compulsion envers les étudiants.
Quelqu’un qui croit que la rue est plus un moyen de circulation qu’un moyen d’expression.
Bon, il fallait bien qu’elle y soit, la suprématie du char… (J’en ai un, en passant.)
Quelqu’un qui paie ses impôts, et qui croit que tout le monde devrait faire sa part dans la société… y compris les étudiants.
C’est tellement simple, pourtant, ils ont visiblement un déficit de matière grise : les étudiants sont surtout des contribuables en devenir. C’est quoi cette manie du « PAYE TOUT DE SUITE! »?
Quelqu’un qui croit que le gouvernement devrait donner l’exemple en coupant dans ses dépenses, avant de puiser dans les poches des citoyens….y compris les étudiants.
Ça, je suis très d’accord. Je crois que tout le monde, à part les vraies sangsues de l’État, est d’accord. Mais il faut faire une distinction énorme entre aider sa population et donner des cadeaux à ses amis, pour faire la part des choses. Je ne suis pas certain que les cols rouges sont capables de la faire.
Quelqu’un qui respecte la loi, et qui croit que les conflits devraient se régler devant les tribunaux et non en hurlant dans la rue.
Pour écrire ça sérieusement, il faut avoir une déficience au niveau philosophique, éthique, et même historique. Point. Il n’est jamais question de devoir ou non respecter la loi, mais bien de la voir comme un concept, une force à contourner au besoin, parce que l’humain est au-dessus de la loi, puisque la loi est une invention humaine. Mais bon, ça ne fait pas trop longtemps que notre société n’est plus gérée par l’Église et ses Lois, ça laisse visiblement des traces profondes.
Quelqu’un qui pense que la liberté des uns de manifester s’arrête lorsqu’elle entrave la liberté des autres de travailler, d’étudier, de circuler ou de …dormir!
Toujours la question des manifestations, ça commence à manquer d’originalité…
C’est le fait de « déranger » par une action visible (et bruyante) qui donne un rapport de force. Ils ne se souviennent plus qu’ils ont criés « LIBARTÉ!!! » bien fort en 2004?
Mais bon, ils ont bien le droit de changer d’idée. Et maintenant, ils sont carrément contre le droit de manifester. Au moins, c’est clair.
Quelqu’un qui croit que dans une démocratie, c’est le gouvernement qui gouverne, et non les manifestants.
Voilà ce qu’est pour eux la démocratie : signez un chèque en blanc aux candidats des partis qui seront élus et fermez vos gueules pendant quatre ans! Nous sommes loin d’un idéal de démocratie participative…
Quelqu’un qui pense que jouer de la guitare ne transforme pas un individu en expert dans tous les domaines.
Ce point est trop ridicule, je vais m’abstenir de commenter.
Quelqu’un qui croit que les syndicats ont le mandat de défendre leurs travailleurs. Point.
Là-dessus, je suis un peu d’accord, dans le sens que les syndicats en mènent large. Mais comment pourrait-on les empêcher de s’exprimer? Et si c’était possible, pourquoi ne pourrait-on pas empêcher les cols rouges de s’exprimer aussi?
Quelqu’un qui considère qu’actuellement, très peu de politiciens, leaders d’opinion ou média ne parlent en son nom.
Ce point final ressemble beaucoup à du pleurnichage. C’est normal que le discours de centre soit plus représenté. Et c’est tellement un cliché : la gauche trouve qu’il y a trop de droite, la droite trouve qu’il y a trop de gauche. Il faudrait en revenir. C’est la diversité des opinions, et ç’a l’air qu’ici (et un peu partout dans le monde), plus tu as une position extrême, plus tu es minoritaire. Alors leur majorité silencieuse, ils peuvent bien se la mettre où je pense…